LA TAILLERIE
DU CORAIL
L’ART DU BIJOU DANS TOUS SES SAVOIR
Depuis plusieurs générations, la famille Robbez Masson incarne un savoir-faire joaillier transmis avec passion et rigueur. De l’arrière-boutique familiale de la rue Jean Jaurès à la Taillerie du Corail, l’histoire de cette institution porto-vecchiaise est celle d’un héritage vivant, façonné par l’amour du bijou, du corail et du travail bien fait.
Les bijoux ont le pouvoir d’être cette petite chose qui peut vous faire sentir unique
Elizabeth Taylor
DATES CLÉS
1974
Ouverture de la bijouterie joaillerie Robbez Masson à Portivechju
1975
Marc Robbez Masson prend les rênes du magasin
1980
Naissance de la Taillerie du Corail
1999
Erica, fille de Marc, rejoint l’aventure familiale
2024
Mateo Figueras, fils d’Erica, forme la 3ème génération de la Maison.
Une Maison de famille
L’Histoire familiale de la Bijouterie Joaillerie Marc Robbez Masson s’enracine bien au-delà de la fondation de la Taillerie du Corail et dépasse nos frontières insulaires.
On découvre ainsi, au début du XXème siècle, Eugénie et Joseph Burderon, lapidaires de métier, qui ne sont autres que les arrière-grands-parents de Marc. Plus tard, ses grands-parents, Juliette et Luc Robbez Masson, paysans de métier, deviennent lapidaires l’été pour subvenir aux besoins de leur famille dans des temps difficiles.
Le père de Marc, Marcel Robbez Masson, perpétue cette tradition familiale en tant que lapidaire diamantaire, mais s’oriente, dans un second temps, vers la fabrication de bijoux. Avec son épouse Gisèle, il ouvre à Mende, dans le sud de la France, sa propre bijouterie-joaillerie. Très vite, la Maison Marcel Robbez Masson devient une référence incontournable.
C’est dans cet univers que grandit Marc. Bien qu’il nourrisse une une véritable passion pour la gastronomie, c’est d’ailleurs un téléspectateur assidu de Top Chef, son coeur penchera en faveur de la création de bijoux.
A tout juste 16 ans il franchit les portes de la prestigieuse « Ecole de Joaillerie », 58 rue du Louvre, aujourd’hui devenue la Haute Ecole de Joaillerie. Cet établissement séculaire et de renom enseigne aussi bien les savoir-faire ancestraux que les technologies les plus récentes du métier. D’ailleurs, quelques décennies plus tard, sa collaboratrice, Anne, y fera aussi ses armes.
Le jeune homme y obtient son CAP après une année de Bijouterie, suivie d’une année de Joaillerie, et d’une troisième année en apprentissage chez un grand Joailler : l’atelier Blondeau. Artisan non des moindres parce qu’il est, à l’époque, l’un des ateliers fabriquant pour Cartier et Van Cleef…
En parallèle, le père de Marc se rend régulièrement en Corse. Il travaille avec les bijoutiers insulaires avec une collection qui leur sont dédiée en corail, or et argent. Lors d’un déplacement à Portivechju, une rencontre fortuite lui souffle l’idée de prendre un fonds de commerce dans cette cité promise à devenir une station touristique de renom. Marcel Robbez Masson comprend alors le potentiel en devenir de Portivechju et décide d’y ouvrir une bijouterie pour sa fille.
En 1974, la Maison Robbez Masson Porto-Vecchio ouvre ses portes 5 rue Jean Jaurès et Marc y fera sa première saison estivale.
Sur Un air d’antan
Diplôme en poche, Marc se trouve confronté de plein fouet aux conséquences du choc pétrolier de 1973. Les Grandes Maisons Bijouterie Joaillerie connaissent alors une crise sans précédent. A son retour à Paris, à la fin de l’été 1975, après sa deuxième saison à la bijouterie de Portivechju, les opportunités professionnelles se font rares. Mais le jeune homme ne s’en désole pas. Pour tout dire, il ne se sent même pas l’âme d’un citadin. Comment apprécier la grisaille parisienne une fois que l’on connaît le soleil de la Méditerranée ?
Alors quand, la même année, sa soeur décide de quitter la bijouterie de Portivechju, Marc, âgé de seulement 19 ans, y voit son opportunité ! Il propose à son père de prendre le relais à la bijouterie.
Il trouve dans ce quartier de Jean Jaurès, l’ambiance « vie de village » qui l’attire tant. Se côtoient les boulangeries Mallaroni, Papi et Simoni, le tabac Cesari, la boucherie Tafani de Caraba, l’unique photographe de la ville, le pressing Picciocchi, le laboratoire d’analyses Deldique – Margheriti, l’épicerie Culioli, le garage BP, l’établissement Holzer de M. Sauer, l’agence de voyage Ettori, l’agence Hertz, puis au-dessus, le bar et hôtel Mistral, ainsi que l’hôtel Panorama de M. Bessière alors adjoint au maire. Même si le cinéma de monsieur Biancarelli avait déjà fermé, c’est le quartier de vie par excellence et la bijouterie y trouve naturellement sa place.
Dans la boutique sont installés l’atelier du bijoutier-joaillier et celui de l’horloger, M. Jean Peinado, qui viendra à Portivechju à la demande des Robbez Masson, initiant les premières réparations de montres dans la cité.
Le corail vendu au magasin, bien que d’origine corse, est taillé en Italie. Donc, très rapidement, émerge le désir de travailler localement le corail et de créer la première taillerie de corail en Corse.
Le Respect du Corail
L’hiver 1980 voit naître, au 46 rue Maréchal Juin, la Taillerie du Corail. A cet atelier de taille viennent s’ajouter ceux de bijouterie-joaillerie et d’horlogerie de la ville. La bijouterie de la rue Jean Jaurès se consacre alors à la vente, avant de fermer ses portes en 2000.
A savoir que le travail du corail se différencie du métier de son père et de ses grands-parents : Les gemmes, pierres précieuse et semi-précieuses, sont taillées et polies en facettes ou cabochon. Au même titre que l’ambre ou la nacre, le travail est différent, tout simplement parce que le corail n’est pas un minéral mais un organisme vivant. La matière est plus dure, et Marc Robbez-Masson insiste sur cette nuance en parlant de « tailleur de corail » plutôt que de « lapidaire ».
Le corail de Méditerranée recouvre les fonds marins entre Marseille et Nice, en Sardaigne, en Croatie ou encore au Maghreb. Il offre un panel de couleurs rouges plus ou moins intenses selon les régions. On en trouve également dans les océans comme l’Atlantique et le Pacifique, et cela depuis la nuit des temps, avec un corail du Japon qui varie entre différentes nuances de blanc et de rose. Fut un temps où il existait même du rouge, mais il est aujourd’hui quasiment disparu.
Toutefois, le corail qui est taillé à l’atelier est, lui, insulaire. Pourtant, aujourd’hui, il est très difficile de se procurer du corail local. La Taillerie travaille principalement grâce à son stock vieux de plusieurs années, constitué par la pêche d’anciens corailleurs bonifaciens qui ne sont plus en exercice aujourd’hui.
Afin d’épargner sa réserve, la taillerie saisit parfois quelques opportunités d’acheter deux trois kilos par ci par là. De même qu’elle peut faire venir du corail déjà taillé, comme les perles, les tubes ou encore les pointes, auprès d’artisans de la « capitale du corail », la cité de Torre del Greco, perpétuant une collaboration vieille depuis plus de quarante ans.
La rareté du corail insulaire ne signifie pas qu’il est en danger : la réglementation veille à sa protection grâce à l’interdiction de la pêche à la croix et la mise en place d’une pêche sélective. Mais le corail qui tapisse les fonds marins est, pour l’essentiel, simplement trop jeune pour être récolté et exploité. Ce sont encore quelques décennies à attendre avant que sa taille soit correcte. Et le métier de corailleur, en raison de sa difficulté et de sa dangerosité, tend à se raréfier, voire à disparaître…
La Résistance du savoir-faire
L’inspiration d’un bijou naît d’un assemblage d’idées : il prend ses racines dans les goûts et les couleurs du moment, dans les tendances de la mode, dans les formes d’autres créateurs… Inspiration qui se confronte également à une réalité économique : le poids de l’or et la taille du corail doivent être « réfléchis » pour rester abordables.
Les idées prennent leur première dimension sur un croquis. Vient la discussion sur la faisabilité de la pièce, le coût engagé et l’approbation de l’équipe. Ensuite, la maquette est façonnée en cire. Les artisans d’art prennent alors le relais, comme le fondeur qui va couler l’or ou le métal à partir de la maquette réalisée et le sertisseur qui ancrera les pierres dans le bijou.
Ainsi sont nées des pièces d’exception comme la ligne Histoires de roses avec son collier en or 18 carats où s’entrelacent des roses de corail rouge et rose de Corse et blanc du Japon, accompagné d’une bague et des boucles d’oreilles de la même essence. Pour cette pièce vertigineuse, c’est le fondeur d’art de l’école de formation de Marc qui a été sollicité, comme un clin d’oeil aux origines du bijoutier. La collection A la folie illustre aussi ce savoir-faire : des bagues d’or blanc ou jaune 18 carats, ornées de pétales en corail rouge de Corse, de pétales pavés de diamant ou encore de pétales de corail rose ou blanc du Japon.
Les collections fantaisie ne sont pas en reste et se laissent guider par les inspirations et les envies du moment, à l’image de la collection Fleurs de ciste, créée en 2023, hommage au patrimoine naturel local…
Fantaisie ou en série, les créations restent artisanales : montage de câbles, filage des perles, pose de fermoir en argent, chaque geste témoigne du savoir-faire de la Maison.
Cette passion et ces valeurs ont été transmises à sa fille Erica, qui a rejoint l’aventure en 1999, apportant un regard neuf et une touche de modernité. Rassuré sur la relève, Marc Robbez Masson envisage de passer la main. Mais voilà que son petit-fils, Matteo, exprime à son tour l’envie de s’investir dans la Taillerie du Corail. Marc repousse alors son départ pour lui transmettre son expérience.
Fervent défenseur du savoir-faire, Marc veut inculquer la rigueur du travail : l’importance de prendre le temps de bien faire les choses, d’aboutir son travail jusqu’à la finition « parfaite », et cela avec de vraies matières, de véritables pierres, etc. Ce qu’il veut aussi laisser derrière lui, c’est le respect du bijou : le poids de l’or, le caratage des pierres, etc… Autant de critères souvent négligés, mais qui représentent l’essence même d’un bijou…
Nostalgique d’un savoir-faire qui se perd, Marc Robbez Masson espère transmettre cet héritage ou, du moins, en donner les clés à ces générations qui feront perdurer l’histoire de la Maison Robbez Masson Porto-Vecchio.